Comme si changer les KPIs avait déjà aidé une entreprise à aller mieux ?
Nous avons tous démarré l’année 2018 en fanfare. Tous les indicateurs étaient au vert pour les entreprises (croissance, climat de confiance, liquidité, appétit pour le risque, etc.).
Nous n’avons pas encore achevé le 1er quarter que déjà on reparle de sous-performance, de difficultés …
"Les emmerdes, ça vole toujours en escadrille". disait élégamment Jacques CHIRAC.
De quelles « emmerdes » parle-on au juste ? Qui a dit que la vie des entreprises était un long fleuve tranquille.
Oui il y a dans tous les secteurs des gagnants et des perdants. Des entreprises qui savent tirer parti des difficultés et aussi des opportunités. Des entreprises qui savent s’ajuster, reconfigurer leur Business Plan …et d’autres pour lesquelles c’est plus difficile …
Sous performance par rapport à quoi ?
Le responsable d’un fonds d’investissement réputé de la place me disait récemment « Je vous rassure. En 20 ans je n’ai jamais vu une entreprise tenir son Business Plan... Ce n’est pas le sujet d’ailleurs…Ce que nous attendons de l’équipe de management de nos participations, c’est qu’elles nous alertent sur les bonnes et les moins bonnes nouvelles après les avoir analysé…C’est au management de trouver les solutions. C’est lui qui est en position de mieux savoir ce qu’il faut faire …». Sous-entendu si le fonds doit commanditer un audit ou faire venir un grand cabinet pour savoir ce qui se passe cela risque d’être chaud pour le management …
La solution : Changer les gens ? Changer le KPI ?
Changer le KPI (Kill People Immediately !) c’est souvent synonyme de changer les gens…
Il y a souvent mieux à faire …Notamment revenir aux fondamentaux c’est-à-dire mettre ou remettre en place la bonne vieille prévision de trésorerie qui permet de comprendre concrètement comment s’articulent dans la pratique les encaissements et les décaissements… Et à cette occasion de ne pas hésiter à soulever toutes les pierres …Il sera toujours temps, ensuite, de changer ou de compléter le ou les KPIs…
Dans beaucoup de situations de sous performance rencontrées récemment, l’entreprise avait trop de KPIs…Elle se noyait dans les détails …Plus personne ne les regardait…Chacun dans l’entreprise avait le sien, comme par hasard celui qui allait bien, et laissait à l’autre, aux autres, celui ou ceux, qui allaient moins bien…
Seule la prévision de trésorerie permet de mettre le doigt sur ce qui se passe. S’agit-il de décalages et quelles en sont les causes ? S’agit-il de causes plus profondes ? Et surtout de savoir de combien de temps on dispose pour traiter les causes …
Je n’ai jamais rencontré de Fonds d’investissements qui ne comprenne pas un sujet de décalage dans le temps si on lui explique correctement…En revanche j’ai vu beaucoup de Fonds s’agacer avec des équipes de management, qui malgré les difficultés de trésorerie, s’arqueboutaient sur leurs acquis, leur batterie de KPIs, et persistaient à réfléchir avec leurs schémas classiques …sans avoir vraiment fait l’analyse des encaissements et des décaissements (qui pourtant tient sur une simple feuille Excel)…
La question du temps !
Combien faut-il de temps pour convertir 1 Euro de chiffre d’affaires en 1 Euro en CASH ? Combien faut-il de temps pour convertir 1 Euro d’Ebitda en 1 Euro en CASH ? Combien de temps pouvons-nous tenir ? Combien de temps pouvons-nous tolérer cette situation ? Quels sont les leviers pour optimiser et gagner du temps si les solutions pour corriger prennent quelques semaines / mois avant de porter leurs fruits ?
La question des personnes aussi ?
Vous aurez beau changer les KPIs, changer les formats de reporting, voire changer les outils ou les systèmes d’information, si l’équipe de management n’adhère pas à la démarche (se remettre – un peu- en cause ?) et n’adhère pas à l’exercice ou au nouvel indicateur …A quoi bon ?
Un autre patron de Fonds me confiait la semaine dernière « Nous rencontrons beaucoup de Directeurs Financiers pour qui être Directeur Financier ne consiste pas à diriger une équipe Finance …pour qui être Directeur Financier c’est autre chose … ».
Soyons clairs, le boulot du CFO c’est de s’assurer que les prévisions de trésorerie sont fiables. Ce n’est pas le boulot du Fonds d’investissement. Par contre le boulot du Fonds, c’est de s’assurer que l’on a le bon DAF …compte tenu de la situation…
La question du comportement du Directeur Financier …
« Si le DAF ne s’implique pas dans la prévision de trésorerie, nous avons notre réponse…Tant pis pour lui … ». En plus il a tort car en période de sous performance la prévision de trésorerie est le bon outil pour fédérer l’entreprise…Meilleur en tout cas que de signer un chèque en blanc au dirigeant, quels que soient ses faits d’armes passés ou son charisme. « Les têtes brûlées » avec Robert Conrad étaient inspirées de faits réels, héroïques, mais c’était quand même une série TV…
Les problèmes viennent rarement d’une seule personne …Cela se saurait !
Les sujets de dégradation de la trésorerie opérationnelle ou du faible niveau des encaissements sont le plus souvent liés au très faible niveau de relation (c’est un euphémisme !) entre personnes ou entre les personnes de services différents (commercial, administration des ventes, comptabilité, etc.). Mettre un indicateur sur le niveau de crispation entre des personnes qui depuis des années ne s’adressent pas la parole sert à peu de choses…Il faut descendre dans l’arène et aussi dans les détails, se frotter à la réalité du terrain et faire soi-même pour démontrer que le petit effort que l’on demande en plus aux équipes est possible…Tous les managers de transition, ceux d’Objectif CASH en tout cas, mettent les mains dans le cambouis …De là à dire que dans ces moments-là, seul l’indicateur sur le CASH est pertinent …Dans certains contextes oui …au moins pour quelques semaines, le temps de relancer la dynamique …
La question de l’ownership ! Y-a-t-il un pilote dans l’avion ?
De même lorsque l’on se retrouve en sur stock, et que malgré les KPIs qui nous disent tous la même chose c’est-à-dire « On va dans le mur ! » SAP continue de ronronner comme avant et de « cracher » à longueur de journée des commandes d’approvisionnement de matières premières pour des références qui ne tournent pas. Qui se saisit du problème ? Les achats ? Le contrôle de gestion ? La production ? La Direction Générale ? Le DAF ? L’informatique ? Tous ? On se fait une énième réunion ? En tout cas pas le KPI ni le grand cabinet avec son équipe de « petits jeunes » bien formés que l’on a mis sur le sujet pour se débarrasser du problème…
L’enchaînement des causes …
« Nier la réalité. Nier les faits ..ça pue ! » me dit un Directeur de Participations. « Nous sommes là pour échanger sur tous les sujets. Jouer l’effet miroir...Plus que pour aider …Nous n’avons pas l’expertise opérationnelle. Et en plus ce n’est pas à nous à aller régler le niveau des commandes dans l’ERP…Si nous n’avons pas de réponses à nos questions ou des réponses fumeuses cela démarre mal. Ce serait trop facile si les problèmes à chaque fois étaient localisés dans une seule fonction…Les interactions entre les fonctions …Je veux dire « le manque de dialogue entre les personnes ou les services … le plus souvent les problèmes sont liés entre eux…Outils, mesure, comportements, attitudes, manque de dialogues …Un problème de cash masque d’autres difficultés plus graves …»
« En escadrille.. » qu’il disait Jacques CHIRAC…
En savoir plus, échanger sur les questions liées au Directeur Financier dans un contexte de LBO.
« Les 7 péchés capitaux de la trésorerie opérationnelle. 12 bonnes pratiques pour optimiser … »
« DAF de LBO : Une nouvelle race de Directeurs Financiers ! »
David BRAULT
Directeur Associé
Objectif CASH
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